dimanche 20 avril 2014

Milo, contreverse, suite. Le privé et le public, la parole et l'écrit, l'écrit et la publication


 De la pensée vue comme défécation...

 




Intéressant. Lorsque quelqu'un vous dit "tu es une ratée, une minable etc.." mais en PRIVÉ, oh le beau mot, privé.. tout va bien, c'est du PRIVÉ ! Ça ne regarde personne, ce n'est donc RIEN. Mais lorsque la victime l'écrit, l'analyse, là, ça devient emmerdant... emmerdant pour celui qui l'a proféré bizarrement.. par rapport à l'image glamour d'humaniste féministe (c'est un "kit") bien disant pour la Galerie. Magie : lorsqu'on "rapporte" voire lorsqu'on analyse ("rapporte" ! encore un terme péjoratif, le vocabulaire du français est hautement signifiant!) la honte change de camp (Marx). C'est sans doute pourquoi on nous apprend, que dis-je, qu'on nous ordonne ! de nous taire, surtout si on est une femme. (Idem pour les coups du reste) : pudeur, bienséance, c'est comme montrer son "cul"... au sens propre ou figuré.. d'où le déchaînement contre Milo et toutes celles qui l'ont osé. On de doit pas. Et bien, si, justement, il le faut.

De même, lorsque sur le net, un "fil" dérape un peu question sexisme (contre une femme, Milo Moiré en le cas).. un mini tollé bon enfant un brin enfantin, "on" en rajoute, "on" se marre dans la chambrée, rien de très grave, on entend pire parfois même dans de bons lycées, mais par principe il faut réagir, surtout lorsqu'il s'agit d'"amis" virtuels très "droit de l'homme" d'habitude. Sans beaucoup de succès, en gros "depuis qu'on a la pilule, de quoi se plaint-on?"

On gêne.. mais si en plus on reprend ces joyeusetés sur un blog féministe (sans y toucher un poil) là, rien ne va plus, c'est presqu'un vent de panique qui se lève. Qu'y a-t-il de changé pourtant? Rien, mais ça dérange non plus la femme taclée (et d'autres qui se sentent atteintes à travers elle), mais.. les tacleurs ! Donc le discours, même écrit, est lui aussi une question de cadrage, d'éclairage, c'est à dire de "qui" regarde et quoi dans le tableau.* Un blog féministe draine forcément des.. féministes.. sur un fil de joyeux drilles qui blaguent un peu avant l'apéro, tout va bien, c'est comme qui dirait en "PRIVÉ" ; (question, la "gaillarderie" privatise-t-elle automatiquement un discours, le rend-elle strictement réservé aux mecs?) .. mais calé sur un blog achalandé sérieux, triple zut, ça prend une toute autre gueule (la véritable en fait: les grosses blagues de ce genre sont hautement significatives du malaise éprouvé par des hommes devant une femme qui ose montrer son corps et se servir de son vagin pour peindre... Le vagin! un truc aussi infâme -enfin en public parce qu'en privé, c'est plutôt très-très-très apprécié-, quand on est bien élevées, ça se CACHE Un malaise qui génère une agressivité et une rancune implicites : si "elles" n'ont plus honte de leur corps donc d'elles-mêmes en tant que sexe, "on" perd une faille indispensable pour enfoncer un coin et faire levier. La victimisation d'un groupe social, ethnique, sexuel.. passe et perdure toujours par la honte qu'on lui inflige d'être (et à laquelle il semble consentir en se taisant)... d'être en tant que groupe, même si cela semble ne concerner qu'un/e individue particulière. (Ici, c'est "juste" d'une "écervelée exhibitionniste" dont on prétend se moquer, Milo Moiré, en fait, c'est un exemple.) Il faut "la" remettre au pas. C'est pourquoi même des gens parfaitement humanistes et bien disant en remettent une couche. Sous les brocards, il s'agit d'isoler celle qui s'est mise en avant.

Que ces bonnes blagues se transforment en agressivité est significatif: elles le sont déjà... mais c'est seulement lorsqu'on les relève que cela se révèle. Les didascalies du scénario habituel ont été changées, zut, normalement, il aurait fallu rire, faire semblant, être gênée (ou filer). On en a envie c'est vrai, mais si on passe outre et sonne le rassemblement, le ton change. Le scénar est bel et bien à revu à la hausse.

Autre exemple : de la même façon,  mais en PRIVÉ, les insultes (ou ce qui les figure, "tu es une ratée") peuvent suivent immédiatement de petites plaisanteries douteuses "gentillettes" qui sont en fait des sarcasmes cruels... auxquelles la victime n'a pas répondu comme prévu, en faisant semblant d'en rire ou en éludant. C'est le syndrome du "journaliste".**

*Il me souvient avoir dit autrefois à des élèves à propos de l'un d'eux un brin fada qui s'était quelque peu lâché lui aussi (une obscénité, je crois qu'il s'agissait de sucer sa boite, un truc du genre, celui-ci disait ça comme bonjour. Je lui avais demandé de l'écrire, à quoi il s'était refusé, horrifié) : "lorsque vous dites quelque chose, il faut toujours pouvoir l'écrire ou le voir écrit et lu par d'autres. Sinon, c'est une choserie dont VOUS avez honte vous mêmes, donc il ne faut pas le dire."

** O+, s'étant "plainte" -sans excès- d'articles de plusieurs journaux dont certains, rapportant une interview, avaient légèrement modifié ses propos quant à la forme, O-> (gêné peut-être par la mise en avant inattendue de sa compagne ?) se précipite vers le balcon, mimant la terreur et s'écriant "file te cacher, il y a la foule, vite!.." (rires devant la tête de O+ qui a marché). Agacée, pour une fois, elle réplique sèchement.. le ton monte immédiatement et à la quatrième réplique, O-> éclate : "de toutes façons, je ne comprends même pas comment il y en a qui ont le courage de te lire, tu devrais t'estimer heureuse que même un petit canard de merde ait parlé de ton bouquin, même si ça ne te convient pas et si le journaliste, crime de lèse majesté, ne l'a pas lu." Une autre manière de dire "tu es une merde" déjà incluse dans la "plaisanterie".

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LE DOSSIER "Quand les femmes prennent leur corps en main "
http://femmesavenir.blogspot.fr/2014/04/quand-les-femmes-prennent-leur-corps-en.html

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