L'excision chez les Égyptiens remonte à 5 ou 6000 ans avant J-C, c'est-à-dire qu'elle plonge ses racines dans le néolithique, et qu'elle a dû être d'un usage courant dans toute l'humanité protohistorique. Son extension géographique l'atteste: Egypte, Ethiopie, Syrie, Perse délimitent en effet le foyer de la première néolithisation occidentale. Elle n'a donc a priori rien à voir avec les religions même si celles-ci s'en sont emparées.
(Auffret Séverine. Des couteaux contre les femmes. Paris: Grasset, 1982, p.145)
Elle s'est
donc développée bien avant l'apparition des religions révélées, monothéistes.
La carte géographique montre que les pays à métissage
négro-arabes et africains l'ont adoptée rapidement mais il est difficile de
situer avec exactitude son origine. Elle a été pratiquée à l'époque
des pharaons (les momies égyptiennes sont excisées). Nawal El Saadawi rapporte dans son ouvrage La face cachée
d'Eve (The Hidden face of Eve. London: Zed Press, 1980) que déjà en
l'an 700 avant J.C. Hérodote la mentionne et c'est de là que
proviendrait le nom "excision pharaonique" pratiquée au Soudan et en
Afrique de l'est. Les fondements mythiques des pays de la corne de l'Afrique
rapportent que l'on pratiquait l'infibulation pharaonique sur les femmes pour
éviter qu'au moment des razzias effectuées par les Arabes, elles ne soient
violées. (Ndlr, idiot car cela n'empêche pas le viol, au contraire -par sodomie-.)
En 1769, Carstens Niebuhr, explorateur allemand, la constate sans s'en formaliser que sur les rives du Golfe persique, parmi les chrétiens d'Abyssinie et d'Egypte, parmi les Arabes et les Coptes (chrétiens). (Cité par Amna Elsadik Badri. "Circumcision in Sudan" in Giorgis Belkis. Excision en Afrique. Dakar: AAWORD/AFARD, 1981, p.130)
.
A l'époque de la colonisation, la
pratique de l'excision ne soulève aucune polémique en Europe. Les
anthropologues, les administrateurs coloniaux et l’Église catholique sont au
courant mais n'en n'ont pas fait cas Par exemple, dans
son ouvrage sur les Bandas de l'Oubangui-Chari (aujourd'hui Centrafrique), le
R.P. Daigre donne une description détaillée de la cérémonie en soulignant son
importance sociale :
Au jour convenu,
les fillettes sont conduites par leurs mères en un coin retiré de la brousse,
où elles subissent l'excision. Après la cérémonie, elles revêtent une ceinture
de feuillages et, pendant une quinzaine de jours, la danse est leur seule
occupation; elles parcourent les villages en sautillant et chantant en chœur
les chants appropriés. Toutes les femmes du villages suivent en
cadence.(op.cit.)
.
.
La clitoridectomie en Europe au 18e et 19e siècle:
Isaac Baker Brown
La clitoridectomie fit partie intégrante de la médecine
européenne. Bien que l'histoire ait retenu surtout le nom du docteur Isaac
Baker Brown (1812-1873), nombreux furent les médecins qui soignèrent ainsi les
cas "d'hystérie, de migraines et d'épilepsie". Isaac Baker Brown,
qui étudia au "Guy's Hospital" de Londres, devint un gynécologue de
renom, spécialiste du traitement des kystes dans les ovaires. En 1854, il
réussit pour la première fois à opérer une patiente - qui était sa propre soeur
- en lui enlevant les ovaires et devint ainsi une célébrité dans le monde
médical. La même année, il publia son livre On Surgical-Diseases of Women.
En 1865, il fut nommé président de la "Medical Society of London" et
membre de plusieurs sociétés savantes nationales et internationales. Au sommet
de sa carrière, il publia l'ouvrage On the Curability of certain Forms of
Insanity, Epilepsy, Catalepsy and Hysteria in Females (1865) où il
recommandait la clitoridectomie comme intervention chirurgicale afin de soigner
les maladies mentionnées dans son essai. Isaac Baker Brown décrit plusieurs cas
qu'il aurait opérés. Une jeune fille de 21 ans souffrait depuis des mois de
douleurs dans le dos et d'hémorragie en allant à selle. Les médecins qui la
soignaient avaient diagnostiqué une malformation de la matrice et firent appel
au Dr. Isaac Baker Brown qui aurait constaté que ses organes génitaux
internes étaient en bon état mais qu'elle présentait des lésions sur les
organes génitaux externes. Il lui extirpa le clitoris et selon ses dires, la
jeune fille n'eut plus jamais de douleurs dans le dos. Dans un cas d'épilepsie,
Isaac Baker Brown diagnostiqua que la patiente présentait des signes de
masturbation sur la partie externe des organes génitaux (?) et avait un polype sur
le col de l'utérus, il lui enleva le clitoris. Baker était convaincu que
l'origine de toutes maladies nerveuses prenait sa source dans la masturbation.
Afin d'enrayer cette pratique, il enlevait aux fillettes et aux femmes le
clitoris et dans certains cas les petites lèvres. La sortie du livre de Baker provoqua
un véritable tollé dans le milieu médical. On lui reprocha d'avoir opéré des
femmes sans le consentement préalable du mari ou du père (!). Mais surtout de se vanter d'avoir inventé la clitoridectomie comme méthode de
traitement. Dans une
lettre il
réfute ce reproche et dévoile les sources où il a puisé la pratique de la
clitoridectomie se référant à deux auteurs de l'antiquité, à un manuel
d'un médecin français du 18ème siècle et à une thèse de doctorat d'un étudiant
en médecine allemand. Une vive controverse s'ensuit et
presque tous les numéros de Lancet et du Britisch medical Journal
publient les prises de positions des partisans et adversaires de cette méthode
entre 1866 et 1867. Finalement en 1867 Baker-Brown est obligé de démissionner
de son poste de Président de la société médicale "British Medical
Society", perd son poste de gynécologue à l'hôpital ... Depuis lors, la clitoridectomie n'aurait
plus été pratiquée en Grande-Bretagne officiellement. Cependant J. Arkwright écrit dans le British
Medical Journal (Arkwright J. "Excision of the clitoris and the
Nymphae" in British Medical Journal 28. 1. 1871,
p.88) qu'en 1871 il aurait eu recours au service de Baker-Brown pour soigner
une patiente. Ces exemples illustrent que l'excision a été une
pratique fréquente en Europe jusqu'au 19e siècle et qu'elle n'était pas considérée
comme un acte barbare..
.
.
Géographie de l'excision
La lutte contre l'excision a
longtemps été un sujet tabou mais déjà bien avant l'Indépendance des pays
d'Afrique en 1960, des médecins, des sages-femmes africains ont mené dans l'ombre une lutte acharnée, exemple Henriette Kouyaté, gynécologue depuis 1955 une des militantes de la
première heure qui s'est engagée dans la lutte:
Depuis 1955,
je milite pour l'abolition des mutilations génitales féminines. A l'époque, je
vivais au Mali où j'avais à m'occuper des femmes dans les diverses phases de la
vie: accouchements, stérilité, période située entre les naissances, et bien sûr
les femmes excisées. En ce temps-là, il était inimaginable que l'on puisse
parler soit de l'excision soit de la polygamie. Cependant, nous tentions en
cercle restreint de conseiller les gens, de les convaincre de ne pas exciser
leurs enfants. Il existe au Mali des femmes qui sont nées avant les années 60
et qui ne sont pas excisées.
(A. Walker. Pratibha Parmar Narben oder die Beschneidung der weiblichen Sexualität. Reinbek B. Hamburg: Rowohlt, 1993, p.313 - ma traduction)
(A. Walker. Pratibha Parmar Narben oder die Beschneidung der weiblichen Sexualität. Reinbek B. Hamburg: Rowohlt, 1993, p.313 - ma traduction)
On estime que la clitoridectomie est
pratiquée dans 28 pays du monde et toucherait 75 millions de femmes. (Ndlr, bien plus de nos jours!) Chaque
année 2 millions de filles subiraient une MGF.
En Afrique de l'est: au Kenya (70%),
en Afrique de l'Ouest: au Sénégal (20%), en Guinée (85%) en Sierra-Leone 90%,
en Côte d'Ivoire, au Bénin, au Ghana, au Nigéria (80%) etc... (Rapport de
l'UNICEF) mais elle existe aussi en Indonésie (ndlr boudhiste) et en Malaisie. L'infibulation
concerne surtout les pays de la corne de l'Afrique comme la Somalie (95%),
L'Ethiopie (90%), l'Erythrée (95%), Djibouti (95%), le sud de l'Egypte (90%),
le Soudan (98%) mais aussi le Mali. Parmi les pays arabes qui pratiquent
l'excision notons: Le Yémen, les Emirats Arabes Unis, le Bahreïn, Qatar, Oman,
la Mauritanie. En Asie, les musulmans originaires de l'Indonésie, de la
Malaisie, du Pakistan et de l'Inde la pratiquent également (?) en se
référant à la religion. Ces chiffres sont certes aléatoires mais au-delà de
l'arithmétique, le problème reste entier. Si les mutilations diminuent en
certains endroits, cette pratique est loin d'avoir disparu partout.
.
.
Les statistiques varient selon les
régions, selon les groupes ethniques, les actions de sensibilisation,
l'évolution des attitudes... Ainsi au Burkina-Faso depuis la campagne pour
l'abolition des mutilations génitales, le taux serait tombé à 66%. En Égypte,
selon Afrique-Femme-Info (juin 1998), il serait même passé de 90% à 30%
depuis 1994. (Ndlr Chiffres en totale contradiction avec d'autres.) Dans certaines régions, l'excision aurait complètement disparu au
début de l'an 2000 un très grand nombre de femmes sont encore victimes des MGF.
.
.
L'excision: définition
On distingue plusieurs formes de
mutilations génitales:
- la clitoridectomie ou ablation du
clitoris est la forme la plus légère et aussi la plus répandue dans les pays
sahéliens à l'exception du Mali.
- l'excision ou l'ablation des
petites lèvres est souvent suivie de la clitoridectomie.
- l'infibulation pharaonique connue
au Sénégal sous le nom de "taf", de "hara" en Egypte"
et de "gudniin" en Somalie, consiste en l'ablation du clitoris, de la
totalité des parties génitales externes: des petites lèvres et des deux tiers
des grandes lèvres, puis couture et rétrécissement de l'orifice vaginal. Une
très petite ouverture est laissée pour l'évacuation de l'urine et du sang
menstruel. Elle est pratiquée au Soudan, en Somalie, en Ethiopie, à Djibouti
et en Erythrée. C'est la forme la plus douloureuse. Une autre forme est l'atrophie du clitoris et / ou
des lèvres par massage en piquant et en perçant ou en massant le clitoris du bébé afin de
le rendre insensible dès les
premiers jours qui suivent la naissance afin d'éviter que le clitoris ne se développe.
.
Les raisons qui poussent des millions de parents à
mutiler ainsi leurs enfants sont d'abord liées à des contraintes sociales,
mélange de superstitions, de tradition ancestrale et de religion. La plupart souhaitent faciliter l'intégration
sociale de leur petite fille, éloigner d'elle le mauvais sort, la maladie, la
folie, la stérilité etc... L'excision serait garante d'une vie chaste,
éviterait l'adultère et assurerait la virginité de la jeune
fille jusqu'au jour du mariage. ( Ndlr on voit mal en quoi.) (cf. Awa Thiam. La parole aux
Négresses. Paris: Denoël, 1978, p.93 et Chantal Patterson. "Les
mutilations sexuelles féminines: l'excision en question" Présence
Africaine, no. 141, 1987). Elle favoriserait la position de la femme
au sein de son foyer et même la naissance des fils si précieux. La pression familiale joue un rôle important : les belles-mères issues
d'ethnies qui pratiquent l'excision n'acceptent pas une bru non excisée au sein
de la famille, la jugeant impure et refusant qu'elle prépare les repas. Elle
est la risée des autres membres et doit supporter les quolibets des coépouses
(Véronique Ahiyi. "Médecin-gynécologue. Henriette Kouyaté Carvalho
d'Alvarengo" Amina no. 324, avril 1997, p.30).
Olayinke Koso-Thomas, médecin nigériane donne dans son enquête les mêmes raisons : l'excision favorise la fertilité féminine, la
santé; sur le plan esthétique, elle conserve la femme, augmente les chances de
se marier, active la vigueur sexuelle de l'époux, renforce le sentiment
d'appartenance à un même groupe, permet d'éviter toute déviation sexuelle - y
compris la prostitution et l'adultère, elle sauvegarde la vie du nouveau-né,
préserve la virginité. (Olayinke, Koso-Thomas. The
Circumcision of Women. A Strategy for Eradication. London, 1987, p.46). Certains groupes ethniques comme les Bambara du Mali
attribuent au clitoris le pouvoir d'empêcher les rapports
sexuels et la procréation "vagina denta". B. Groult rapporte que
"Les Bambara excisent le clitoris en prétendant que son dard peut blesser
l'homme et même occasionner sa mort" (Groult, Benoîte. Ainsi soit-elle.
Paris: Grasset, 1975, p.98). De tels préjugés sont le résultat de l'ignorance
dans lequel baignent la plupart des groupes ethniques qui pratiquent
l'excision. Les conséquences sont désastreuses comme le relève également H. Kouyaté, gynécologue et directrice de la clinique Sokhna-Fatma de Dakar
(Sénégal): "le risque d'être contaminé et d'attraper ainsi le SIDA
constitue aujourd'hui un nouveau danger, d'autant plus que les ustensiles que
les exciseuses utilisent sont rarement désinfectés".
Annette Mbaye d'Erneville pionnière des Associations Féminines du Sénégal (FAFS) dont elle est la
Présidente relate par exemple le cas de cette petite fille Diola qui, n'avait
pas été excisée et qui meurt d'un neuro-paludisme. Les parents, accusés par la famille d'avoir enfreint les
règles, sont convaincus que l'ire céleste s'est manifestée ainsi, car ils ont
osé transgresser une coutume et violer un tabou. Ils s'empressent donc
d'exciser les autres filles de la famille. (P. Herzberger-Fofana Littérature
féminine francophone d'Afrique noire francophone. Paris:
.
Pratique
.
Pratique
Une série de vaisseaux sanguins
conduisent au clitoris entre autres l'artère dorsale, la veine principale du
clitoris. Celle-ci au cours de l'opération peut être endommagée et provoquer
des risques d' hémorragie. Dans le cas de l' infibulation ou "taf"
pratiquée au Sénégal, compte tenu de l'ouverture minime qu'on laisse, la taille
d'une allumette, au moment des menstruations tout le sang ne s'écoule pas et à
la longue cela peut engendrer des douleurs qui, si elles persistent provoquent
la stérilité. Au moment de l'accouchement la femme excisée doit subir une
déchirure au scalpel afin qu'elle puisse accoucher normalement. Or, la majorité accouchent à la maison et sont laissées à leur sort. En cas
de décès, on accusera les mauvais esprits ou "rabs" de s'être
manifestés. Elles se déchirent parfois à tel point entre le rectum et le
vagin que les muscles fessiers lâchent. Par la suite, ces elles ne
peuvent retenir ni leurs urines, ni leurs selles (ndlr, et sont bannies de la tribu). Dans les cas
d'infibulation, les rapports sexuels sont appréhendés. (A. Walker Pratibha Parmar. Narben oder die
Beschneidung der weiblichen Sexualität. Reinbek B. Hamburg: Rowohlt, 1993,
pp.314-315 - ma traduction)
Le point de
vue des chrétiens
Si en
général, la plupart des filles excisées seraient issues de pays d'obédience
islamique, mais il faut souligner que certains chrétiens s'y livrent également.
Selon Léo Frobenius les Haoussas du nord-Nigéria ne pratiquent pas cette
coutume, contrairement aux chrétiens du sud du Nigéria, du Burkina Faso, du
Kenya et de l'Afrique de l'est en général (Leo Frobenius. Kulturgeschichte Afrikas. Prologomena zu einer historischen
Gestaltlehre. Zürich: Phaidon Verlag, 1954. Reprint: Wuppertal: Peter Hammer
Verlag, 1993, p.177). Il en est de
même de certains africains expatriés en Europe ou ceux de la Corne de
l'Afrique émigrés aux Etats-Unis qui restent parfois très attachés à cette
coutume (cf. Celia Dugler. New York Times). Les chrétiens égyptiens ainsi que
les juifs de l'ancienne Abyssinie, actuelle Ethiopie, les Falachas
pratiquaient l'excision (Leslau Wolf. Coutumes et croyances des Falachas.
Paris: Institut d'ethnographie, 1957, p.93) mais émigrés en
Israël au début des années 70, ils y ont renoncé (ndlr, par force!) et cette pratique a en l'espace de 15 ans
complètement disparu. Suite
http://aflit.arts.uwa.edu.au/MGF2.html
.
http://aflit.arts.uwa.edu.au/MGF2.html
.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire