jeudi 23 janvier 2014

Une femme embarquée, prototype d'une lettre de rupture

Cette histoire, relayée à l'infini par des femmes parfois assez mal en point constitue un modèle. Voici donc une lettre-type de démission, pour celles qui ont réussi à sauter dans un canot où elles rament.. ou qui sont encore sur le Titanic en train de sombrer... à l'attention de ceux qui les ont embarquées sur l' ''insubmersible''. (Lien avec ''le syndrome de Bruce''.) Sa banalité même, alors qu'on la croit le plus souvent spécifique, honteuse donc À CACHER -ce qui isole et amoindrit- est à la fois préoccupante et rassurante. ON LAVE SON LINGE SALE AU LAVOIR. Note: celui à laquelle elle s'adresse est un ex militant libertaire (!) .. qui a mal tourné, à moins qu'il ait toujours plus ou moins ? caché son jeu.

Paris, les Cévennes.. la poésie, la sécurité.. j'ai deux amours
Lettre aux embarqueurs,
 prototype et formulaire

''Mon chéri, j'ai, avant de démarrer, quelques mots à te dire. Une sorte de bilan, de contrôle de Cour des Comptes dont pour une fois c'est toi qui es l'objet. Tu n'es pas habitué ? Oui. Ça sent le roussi? Oui. Et cette fois il y a un point à la fin.. et l'éternel retour ne sera pas.

Car lorsque ça sent le roussi, tu y vas d'une amabilité, voire, si l'urgence le requiert, d'une laudation. Vague : ''tu fais des trucs pas mal -ou vraiment pas mal-..'' Je n'ai rien demandé mais je suis bon public.

... et peu après ou tout de suite, ça dépend de la gravité du roussi et du temps que tu as décidé de m'impartir -le mien n'est jamais tenu en compte-, tu enchaînes par un ''MAIS'' suivi de mercuriales insultantes et dramatiques qui démarrent d'abord mezzo, puis montent staccato de plus en plus vite jusqu'à l'explosion du finale (parfois une à deux heures non stop), inversant le mouvement : le dithyrambe devient catilinaire- (Cela rappelle la manière assez cruelle dont Saint Simon décrit le Régent..) MAIS.. ''c'est tout de même dommage que tu n'aies pas...'' Suit ''cekejépa'' ou ''cekejé'' (kilfopa.)

Que ''ce-que-je-n'ai-pas-fait'' (ou cekejéfé kifalépa) soit justement relié à toi n'entre pas en ligne de compte. Quand à ''ce-que-j'ai-fait'', ce n'est concédé que pour en souligner les insuffisances et m'accabler sur le mode nostalgique théâtral qui t'est propre (quel dommage que..) Pas davantage n'est pointé ce détail certes mesquin, à savoir que tu fus, toi, incapable de l'effectuer -même si ce ne fut réussi qu'à 98 %-. J'ai des comptes à te rendre. Toi, jamais. On croirait que tu m'as une bonne fois décidée ubiquite et surnaturelle ; -le racisme comme le sexisme partent souvent d'une paradoxale surestimation des racisés- ; je dois être ici et ailleurs et ne faillir ni ici ni ailleurs. Sans oublier tout le reste -les souris dans la cave que tu as baptisées rats pour faire plus joli-. Je dois, je devais et jépa. On -je!- t'ai vendu du poisson pas frais - moi même mais c'était gratos car je ne suis pas une pute professionnelle.- Tu n'as jamais compris qu'une ''qualité'' comme tu dis puérilement n'était qu'un ''défaut'' vu autrement et réciproquement ; tu veux le beurre, l'argent du beurre et le cul de la fermière. La maman et la putain. (Jepetou mais pourtant suizunemerde ; passant sans transition de l'apologétique aux philippiques, tu me fais subir le mouvement du sauteur à l'élastique qui monte et descend à toute allure.. Vertiges.)

Jamais tu n'envisages qu'il n'y ait aucune faute (les choses arrivent par ce que l'on nomme le hasard, puis la nécessité, exemple la guerre).. ni qu'une cause (et non une faute) puisse être multiple, intriquée, inter relationnelle.. donc aussi tienne. Pour toi tout est carré: c'est la faute à Voltaire, c'est à dire à moi kiafé ou kiapafé. Se justifier ? Une erreur. Il m'a fallu des années pour oser mentionner quelques problématiques tiennes infiniment plus lourdes que des fourmis sur l'évier -du moins dans un couple hétérosexuel-. Pourquoi? Justement parce qu'elles étaient plus lourdes? Dirimantes? Par élégance, on dit. Autre erreur. Il ne faut pas être trop longanime avec qui le prend pour allégeance.

Toutes les femmes sont-elles ainsi ? Oui, mais je l'ignore alors car je me tais -à l'extérieur-, je suis DIGNE. Donc isolée. Autre erreur. Suis-je seule à m'enferrer ainsi en position de défense dans des justifications dégradantes -pour des ''fautes'' imaginaires-? Non, mais je ne le sais pas. À occulter le nœud du problème par délicatesse ? Était-ce le but du déferlement? M'aveugler? Les tirades -que l'on peut résumer simplement par ''tu es une merde''- étaient-elles la muleta agitée pour distraire le toro dont on redoute la force? L'erreur est là. => Une crise. Il faut ''la'' soigner, ''la'' faire boucler. Elle est folle.

Pourquoi chez certains -souvent des hommes- cette radicale incapacité à se remettre en cause et presqu'à se voir ? La peur de ce qu'ils vont voir? Un paradoxal manque d'assurance? Et pourquoi l'inverse chez d'autres -souvent des femmes, toujours promptes à se culpabiliser- ? On nous l'apprend. Pas forcément les parents mais toute la société, les revues, les films, les livres même. On a la chance d'avoir un mec, certes quelques ''petits problèmes de couple'' avec, mais ''qui n'en a pas''? De même, après avoir hurlé pendant des heures, certaines assurent ensuite d'un air extasié que ''l'accouchement, c'est un peu pénible, surtout vers la fin, mais tellement beau...''

Pourquoi aussi cette incapacité à saisir l'instant ? Est-ce la cause? Pour aimer, pour désirer, il faut.. de l'amour, justement, et j'y inclue l'estime; plus peut-être. De soi et de l'autre, de soi par l'autre. Du romantisme aussi. Les Don Juan, quelle que soit leur allure, savent faire en sorte qu'en leur présence on se sente unique, extraordinaire -que ce soit sincère ou qu'il s'agisse d'un jeu n'est pas si important-. Mais affirmer ''j'ai tant envie de te voir'' et enchaîner sur ''je viendrai mardi parce qu'il y a des réduc de TGV'' gâche tout.. Puis, reprocher ensuite une certaine froideur (!) exaspère un peu plus. Et enfin, dire ou laisser entendre que l'on est une "ratée" -de surcroît un glaçon- que tu aimes quand même (!) donne carrément envie de hurler.. Ce n'est pas forcément faux : certains ne peuvent aimer que celles qu'ils méprisent, ça les rassure.. et malheur à qui déborde du vase, on essaiera de l'y faire rentrer.. à coups de tatanes s'il faut... C'est à dire de créer ce qu'on déploré, qui n'existait pas ! mais qui finit par se dessiner. (Ainsi Odette, épuisée par la jalousie envahissante de Swann, finira-t-elle par le tromper.) Ça marche facilement lorsqu'on a le pouvoir financier.

M'avoir plusieurs fois demandé de quitter mon travail -"on aura plus de temps pour nous, pour les enfants, on mène une vie de cons, l'argent, la réussite sociale, un truc de bourges, et de plus je gagnerai suffisamment à [..].."- puis me reprocher une carrière obérée -ça doit être le sens du mot "ratée"?- c'est encore la double contradiction : c'est reprocher à quelqu'un d'avoir cédé à ses propres injonctions ; de ne pas avoir fait ce qu'on a rendu impossible parce qu'on a installé les conditions de son impossibilité ; l'entraîner -sous prétexte d'amour- sur un champ de mines -c'est si beau là bas- et lui faire grief ensuite d'avoir sauté. ''Tu aurais dû faire plus attention, jetavédike...'' (non, tu avais même dit l'inverse mais il est vrai que je n'aurais jamais dû te croire.) C'est en somme reprocher leur crédulité à ceux que l'on a trompés. Le syndrome Bruce. (Lien.)

Il t'aurait fallu non pas une mais trois femmes au moins pour venir à bout de tout ce qu'il aurait fallu faire ou ne surtout pas faire.

C'est du reste exactement ce que tu as tenté. Avec une, ça ne va pas, essayons avec deux. Logique imparable. Et ce furent ces tentatives de nous mettre en rivalité (chez Colette-tout-est-classe-impec) qui sonnèrent le glas -ou plutôt les mâtines- de l'histoire. -Et lorsque sonne le glas, ne te demande pas pour qui il sonne, tu le sais bien, c'est pour toi- (la dégradation que tu tentes de me faire subir, c'est d'abord la tienne.) Aujourd'hui, je rends donc publiquement mon tablier. J'ai décidé d'exister."

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