mardi 4 novembre 2014

Les mères voilées accompagnatrices à l'école, un coin dans la roche

Contre l'autorisation de la ministre Nadja Belkacem à des mères voilées accompagnatrices de sorties scolaires. (1)

Réponse à une internaute:
"Une femme qui se voile devient pour les autres musulmanes une leçon de morale ambulante."

- Exactement, et elles ne s'en privent pas. Sans qu'on ne le sache, il y a derrière les sourires, l'innocence, parfois sincère, parfois jouée voire calculée... la culpabilisation, le rejet, et la VIOLENCE envers les non voilées. Sous la plage, les pavés et les flèches. J'ai connu cela autrefois à Dreux. Ayant interdit à une jeune fille -par ailleurs agréable et excellente élève- de se voiler, c'était pendant le ramadan -elle ne le faisait pas d'habitude.. et soudain, je la vois avec ce truc qui ressemblait à un énorme cache nez : "Tu es malade? Enrhumée?" ... "Euh non, c'est juste le ramadan.."..." QUOIIIII ?... Un voile modèle "passe montagne"? Non, désolée, je ne peux pas faire cours devant ça : j'ai l'impression que tu nous/me fais un pied de nez permanent, comme si ta posture démentait exactement au poil près mes propos [...] je n'arrive plus à me concentrer, pas plus que je ne le pourrais devant un gars en uniforme de CRS par exemple ou de militaire"... elle a obéi sans histoires et même en rigolant de l'image... et tout a baigné assez vite... Peu après, l'histoire ayant fait florès, j'ai été défendue par un élève musulman -dans une autre classe- qui voulait devenir avocat et nous a donné à cette occasion en préambule de sa future profession une super palinodie contre le voile que je n'aurais jamais osé faire tant elle était drôle et virulente...  merci Mohamed.

... lorsque à la fin de l'année, des élèves -des filles- d'une autre classe -qui s'étaient tues et n'avaient jamais pris position- me dirent que mon geste avait été FORMIDABLEMENT LIBÉRATEUR pour elles (je ne me doutais de rien et j'avais même pris leur silence pour une discrète réprobation) : elles bataillaient contre leur parents et/ou leur communauté  pour ne pas se voiler et enfin elles tenaient un argument de poids : la prof de philo ne veut pas, elle dit que ça la déconcentre et qu'elle n'arrive plus à faire cours etc... Une chance : bien avant cet épisode, j'avais rembarré sec un gars qui arborait une énorme croix sur la poitrine et lui avais demandé ou de la quitter ou de la planquer, ce qu'il avait fait en protestant un peu. Je n'oublierai jamais les propos de ces élèves, qui n'avaient rien laissé paraître tout ce temps, par peur !! "Votre interdit Madame (note, un interdit à la fois non négociable et non agressif) nous a enlevé un poids immense, la pression était si forte.. et soudain elle a cessé" me dirent-elles unanimement. Autrement dit, peut-être à l'insu de Samira, ce voile passe montagne était un ESSAI pour voir jusqu'où on pouvait aller, un essai qu'il convenait d'arrêter IMMÉDIATEMENT. Et alors pas de problème ; mais par contre, si on laisse couler, arrêter le flot ensuite est presqu'impossible. (Note : les parents d'élèves de ce lycée étaient du genre assez ... disons pragmatique, ils semblaient avoir compris qu'à quelque mois du bac, il ne convenait pas d'alourdir encore la tache des profs, surtout ceux qui trimaient comme des dingues pour porter leurs enfants à bout de bras.. dans leur intérêt même. Une sorte de respect du boulot accompli pour leurs gosses donc pour eux dont j'ai incontestablement bénéficié. Ce n'est pas toujours le cas.)

Il est possible que sans l'avoir calculé, le fait que j'aie porté la charge, non pas de manière directe comme Mohamed -laïcité etc..- mais carrément à la blague ait mieux fait passer le veto (en fait, j'ai très exactement dit "c'est comme si tu me disais merde en permanence, tu comprends... je ne peux pas, ça finit par m'énerver .." tout le monde a ri aux larmes.) 

(1) On touche ici aussi droit au problème du bénévolat, et de la pénurie extrême des moyens de l'école : le bénévolat est DANGEREUX et ne devrait peut-être pas être accepté et encore moins sollicité : comment exiger de quelqu'un QUI REND SERVICE de se conformer aux règles d'un salarié qui vit de son travail? De plus, les sorties scolaires SONT DU TEMPS SCOLAIRE, c'est comme si l'on "transportait l'école" ailleurs pour un temps déterminé -ainsi en a-t-il été jugé pour l'affaire Léonarda- et par conséquent, oblat/es, bénévoles, ou professionnels salariés, TOUS DOIVENT SE CONFORMER AU MÊME RÈGLEMENT :  CELUI DE L’ÉCOLE. Faire une exception pour ces dames représenterait un privilège inacceptable relié à leur situation -elles n'ont pas à travailler, elles, et peuvent faire ce qui bon leur semble- et à leur soi disant dévouement, qui peut parfaitement être aussi un calcul.

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