Thérèse d’Avila, mysticisme et sensualité
Lorenzo Bernini, l'extase de Thérèse |
Thérèse d'Avila comme Jean de la Croix illustre la dimension humaine de l'amour divin dans toute sa splendeur romanesque ambiguë un amour plus passion qu'amour :
Mon Bien-Aimé est à moi, et je suis à lui..." Elle le voit, le dévore du regard, lui parle "0 mon divin Roi, devant votre grandeur, mon âme se consume et ne sait où se mettre... Que sera-ce donc au ciel, si, dès cet exil, votre vue nous inonde de telles délices ?... Jamais je n'aurais pu me figurer une beauté si ravissante, quand j'y aurais passé des années entières, tant sa blancheur et son éclat surpassent tout ce que l'on peut imaginer ici-bas. Mais, c'est un éclat qui n'éblouit point, c'est une blancheur suave, une blancheur qui charme le regard, sans lui laisser la moindre fatigue, c'est une clarté qui rend l'âme capable de voir cette beauté divine, c'est une lumière infiniment différente de celle d'ici-bas, et, près de ses rayons, ceux du soleil ne sont plus rien".
Elle s'agrandit aux dimensions de l'univers entier; par l'amour ardent, qui l'unit à Christ dans l'extase orgasmique, elle atteint l'amour pour l'humanité (cf "Le banquet"). Son envol l'élève au-dessus d'elle-même; vers les autres? Pas toujours, c'est la différence avec Platon : "c'est un détachement extraordinaire que je n'ai point de termes pour définir ; on se sent étranger aux choses d'ici. Là, germent à l'envie, les promesses et les résolutions héroïques, la vivacité des désirs, une sincère horreur du monde, la vue claire de son néant".
Une sorte
d'évanouissement sensuel où "elle est incapable de former une parole et de la
prononcer car toutes les forces extérieures l'abandonnent et sentant par là
croître les siennes, elle peut mieux jouir de sa gloire et de son bonheur" où elle s’abîme: "ce n'est plus mon âme
qui vit, c'est Christ qui vit en elle. Un sentiment délicieux,
ineffable remplace tous les autres et l'absorbe tout entière, celui, intime, de la présence divine". La mort alors lui semble seule issue heureuse. "Je brûlais, je me voyais mourir du désir de voir Dieu et je ne savais où trouver la vie si
ce n'est dans la mort... Mon cœur à chaque instant était près d'éclater."
Dans sa vie de mortifications, elle semble en fête constante. "Oui, pour te servir, fais-moi donc bientôt mourir. 0
mon Seigneur et mon Époux bien aimé, elle est donc venue l'heure tant désirée !
Il est temps de nous voir. 0 mon Seigneur et mon unique amour, il est temps de
partir, il est temps que je sorte de cette vie. Qu'elle soit mille fois bénie
cette heure bienheureuse et que votre volonté s'accomplisse. Que mon âme s'en
aille vers vous, qu'elle s'unisse à vous après avoir si longtemps attendu".
Comme l'amour humain, l'expérience
mystique jette un regard de beauté
sur toutes choses sensuellement transfigurées, telles les passions charnelles éternelles (lien avec la préface de Noces kurdes).
La mort par sa puissance sensuelle semble le lieu de l'accomplissement. Cf Nietzsche : "Ce que l'on nomme amour dans toutes les langues, tous les mutismes du monde, l'ivresse vient ici à bout de la réalité au point que l'on dirait, dans la conscience de l'amoureux, la cause première estompée pour autre chose, un frémissement, un scintillement des miroirs magiques de Circé. L'amour et même l'amour de Dieu restent fondamentalement une seule et même chose : comme une fièvre qui a des raisons de se transfigurer, une ivresse qui fait bien de mentir sur son propre compte... s'imaginer par l'autre plus fort, plus riche, plus parfait, et on est plus fort, plus riche, plus parfait en effet."
La mort par sa puissance sensuelle semble le lieu de l'accomplissement. Cf Nietzsche : "Ce que l'on nomme amour dans toutes les langues, tous les mutismes du monde, l'ivresse vient ici à bout de la réalité au point que l'on dirait, dans la conscience de l'amoureux, la cause première estompée pour autre chose, un frémissement, un scintillement des miroirs magiques de Circé. L'amour et même l'amour de Dieu restent fondamentalement une seule et même chose : comme une fièvre qui a des raisons de se transfigurer, une ivresse qui fait bien de mentir sur son propre compte... s'imaginer par l'autre plus fort, plus riche, plus parfait, et on est plus fort, plus riche, plus parfait en effet."
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