Le dessous des cartes. Sur la polygamie (un de mes derniers articles du "post" avant qu'il ne soit racheté par le Huttington et Anne Sinclair)
04/11/2010 à 01h59 - mis à jour le 05/11/2010 à 11h32 | 926 vues | (lien)
La polygamie en Afrique sub saharienne
-c'est là qu'elle est le plus répandue- est source de drames infinis
qui empoisonnent la vie de toutes les familles ... et de toute la société :
rivalités de clans, de lignées, de fratries -plus que de femmes-,
pseudo esclavage (comment appeler autrement le "mariage" d'adolescentes
moyennant rétribution -à leur famille-, avec des hommes parfois de l'âge
de leur père.. c'est à dire pédophiles ?) Les mutilations sexuelles
vont souvent de pair -l'excision- : il faut éviter que les jeunes
épouses privées du plaisir qu'un homme âgé déjà largement pourvu et
parfois rebutant ne peut leur procurer... n'aillent voir ailleurs un
plus jeune*...
S'y associent aussi grossesses précoces, forcées et trop nombreuses**, la promiscuité et un mélange générationnel souvent délétère -les enfants aînés étant parfois plus âgés que les dernières épouses qu'ils côtoient quotidiennement-... ainsi que la frustration sexuelle -un homme qui accapare dix femmes, c'est neuf célibataires en manque d'épouse-... D'autre part, cela crée à tous coups de précoces orphelins que bien souvent leur mère élèvera seule, parfois sous la coupe de l'aîné de ses beaux-fils ou d'un oncle -qu'elle sera dans certains cas contrainte d'épouser-. Imaginez tout cela sous le même toit! Ce sont des familles entières, c'est à dire en le cas des centaines de membres qui, sur des générations, en seront, en sont définitivement affectés.
La femme y est réduite à un objet, de
prestige, d'utilité, remplaçable lorsqu'elle ne peut produire ou ne
plaît plus -ou lorsqu'une nouvelle alliance s'avère profitable- ...
voire éjectable avec ou sans ses enfants... avec la complicité
(ou l'initiation) du clan marital... voire de "consoeurs" de misère qui
cependant seront elles aussi remplacées à plus ou moins brève échéance
si nécessaire ou par caprice du mari... Les enfants de -ou des-
épouses délaissées se trouveront parfois rejetés avec leur mère - ou
maintenus au sérail mais dans une position d'infériorité qui confine à
l'esclavage vis à vis de leurs demi frères et soeurs-.. voire dans le
pire des cas, coupés de leur propre mère à jamais ou même recrutés
contre elle... et ainsi de suite bien souvent à la venue d'une nouvelle
épouse.
La polygamie n'est pas une question
sexuelle ni religieuse mais une question de pouvoir. De ces innombrables
drames, on parle peu, y compris dans les médias européens, de peur
d'être taxé de racisme.
Une rescapée de ces familles, Suzanne Rousseau, dans "Le petit garçon qui courait derrière un taxi" (HBL éditions) raconte son périple : ses enfants lui furent enlevés, qu'elle ne retrouva qu'adultes, durablement éprouvés malgré un statut social -celui de leur père, ministre- hyper favorisé. Aucun des trois ne s'est remis de ce qu'ils avaient vécu et notamment de l'arrachement à leur mère qu'ils ne revirent jamais. Son fils reste le plus atteint.
L'histoire de Mariam, vivant dans un bidonville et mère d'un hiérarque
Une rescapée de ces familles, Suzanne Rousseau, dans "Le petit garçon qui courait derrière un taxi" (HBL éditions) raconte son périple : ses enfants lui furent enlevés, qu'elle ne retrouva qu'adultes, durablement éprouvés malgré un statut social -celui de leur père, ministre- hyper favorisé. Aucun des trois ne s'est remis de ce qu'ils avaient vécu et notamment de l'arrachement à leur mère qu'ils ne revirent jamais. Son fils reste le plus atteint.
N'édulcorons pas, ne
sourions pas comme s'il s'agissait d'une simple galéjade sexuelle, et ne
comparons pas ce qui n'est pas comparable, ce système parfaitement
codifié qui broie tous ceux qui le subissent, aux infidélités de
vaudeville que nous connaissons. La polygamie, ça n'a rien à voir :
c'est un système totalitaire où le clan prime sur l'être, où tous se
trouvent objet de tous et dans lequel les plus fragiles -les femmes, les
pauvres et les enfants- paient le prix fort : dans l'angoisse, opposés
et rivaux, ils doivent subir et mener au sein même d'un groupe en principe protecteur
une lutte impitoyable faite de cabales, d'intrigues et de
retournements, pour la position, la survie... qui dévore l'amour.
Même
l'enfant -le fils surtout- n'est souvent pour les épouses qu'un moyen
de renforcer un statut précaire ou de poser ses marques pour l'avenir :
les garçons le vivent fort mal, développant alors une névrose spécifique
faite d'amour-haine pour leur mère sur fond de misogynie et de
compassion, qui plus tard, même s'ils ont quitté le groupe, obèrera
leurs relations amoureuses... Cruellement éprouvés dès l'enfance,
ces hommes ne parviendront que très difficilement à la confiance en
l'autre nécessaire à toute relation amoureuse. Ces "aberrations"
transgénérationnelles -où on voit par exemple un garçon dont l'écart
d'âge avec sa mère est quatre fois moindre que celui qui la sépare de
son père !- sont souvent génératrices de troubles psychiques qui
pèseront ultérieurement. HL
* Une variante cocasse et contemporaine,
bien que l'Afrique ait toujours été demandeuse de puissants
aphrodisiaques qui existaient dans la nature, mais de faible effet et
sans danger -comme la noix de cola-, c'est le viagra surconsommé par
ces maris "multiples" épuisés... qui parfois abrège malencontreusement
leur existence.
** Des familles de 20-24 enfants ou plus
sont quasiment la norme... ce qui fait couramment au foyer une
trentaine de personnes ou davantage car l'Afrique étant en principe
accueillante familialement, il n'est pas rare d'y retrouver également
des oncles, tantes ou belles-soeurs, célibataires -ou dans ce second
cas, veuves- eux-mêmes chargés d'enfants etc...
Mais
a contrario -cela est moins connu car c'est la version "cour" du
système- il n'est pas rare aussi de "découvrir" après coup une ex
épouse âgée répudiée autrefois dont le souvenir fut frappé d'omerta
-et qui parfois a été contrainte de se prostituer pour survivre-.. vivant seule dans la misère la plus totale, -"bidonville" ou émigrée à
l'étranger- ... et ceci même si ses enfants demeurent dans le clan à un
rang convenable. Rejetées également par leur propre famille pour
laquelle elles ont "failli" -surtout lorsqu'il s'agit d'une alliance
prestigieuse contractée pour les promouvoir- objet de honte et symbole
de leur échec, les risques qu'elles courent en tentant d'y retourner sont si réels qu'elles
"préfèrent" si l'on peut dire ! une totale marginalisation -délinquance,
prostitution ou misère- à un périlleux essai de réinsertion.
Suzanne Rousseau raconte ainsi sa
rencontre poignante avec une vieille femme qui vivait misérablement dans
une hutte à la périphérie d'un village isolé, de charité, de menus
services et de quelques poules, plus un petit jardin... dont le fils
-qu'elle aussi n'avait jamais revu- étudiant en France puis hiérarque,
ignorait tout de l'existence -affirma-t-il- ou plus vraisemblablement
ne s'en était jamais soucié. Il s'agissait de la première épouse du
beau-père de Suzanne, sa "belle-mère" donc -redite, dont le fils, le mari de Suzanne, occupait pourtant un poste
ultra prestigieux, ministre-... Elle semblait n'éprouver aucune rancune et
refusait farouchement toute "publicité" pour son cas... même si la
séparation d'avec son fils -dont elle se disait en aparté très fière-
l'avait peinée au delà de toute expression. Suzanne voulut l'accueillir
au foyer et parvint à en convaincre son mari : un échec prévisible.
Elle s'occupa avec plaisir de ses petits enfants, mais sans instruction,
vouée à une existence de quasi esclave, admonestée à la moindre erreur
par les autres épouses -veuves comme elle du même mari mais plus jeunes
et de meilleure "lignée" familiale-... peu soucieuses de partager la
maigre pitance qui leur était échue avec une autre, la malheureuse
préféra s'en retourner dans sa hutte, au grand soulagement de tous.] Ça, c'est la
version cour.
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